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Je m'appelle Daniel. Mais je suis Amnésique. Bah quoi... ? 

Ainsi, c'est avec un doublage d'excellente facture que l'on nous lâche dans cette lugubre intrigue auquel on ne voit pas bien clair. Entouré d'un voile de mystères autant que d'une brume de sueur tenace résultant de la légendaire bringue de Brennenburg aillant eu lieu la veille, laissant pour mort ce cher Daniel sur le paillasson du château ; nous voilà aux commandes d'un ivrogne patenté à la voix de Lord snobinard qui ne se souvient de rien. Ou presque. À mi-chemin entre maîtrise de story telling et fainéantise prononcée au service d'une introduction facile, le scénario se pose là, comme cette demeure immense en plein milieu des bois de Prussie (ouais je sais... je sais, j'ai pas gagné en Géographie enculé), avec pour Némésis un vieux pervers décati répondant au doux nom d'Alexander. Ce dernier disposant par ailleurs de passe-temps insoupçonnés que l'on aurait préféré ne jamais découvrir, comme la lévitation à poil dans sa cave. Houdini s'en retourne encore dans sa tombe...

 

Aventure parsemée de clins d'oeil à l'univers mythique de Lovecraft - mais sans tentacules s'il vous plaît - dont une narration très prononcée contenant beaucoup de géométrie impossible et de dramatisme exacerbé. Même si elle n'est pas des plus mémorables, l'histoire d'Amnesia à le mérite de tenir en haleine le joueur du début jusqu'à la fin. Notamment grâce à des doublages qui réussissent sans aucun mal à immerger le joueur dans cet univers suintant de prolapsus déchaînés, jonglant aussi avec des écrans de chargement raisonnablement longs nous offrant des textes abstraits en guise de diversion. C'est avec un certain intérêt que l'on assiste donc à la descente aux enfers de notre héros touche-à-tout (mais incapable de tenir ne serait-ce qu'un putain de marteau pour se défendre), vers l'ascension de ses souvenirs perdus... Tout ça pour découvrir qu'on est encore plus gauche qu'anglais.


Bien que les mécanismes narratifs mis en oeuvre soient assez simplistes pour l'époque, ils n'en demeurent pas moins efficaces et brillent par leur mise en scène modeste mais captivante sans avoir besoin de QTE à outrances ou de cinématiques péchues pour être diablement efficaces. Si l'on peut regretter l'absence de doublages pour chaque texte introduit, l'effort demeure des plus appréciables dans un genre où il est parfois compliqué de s'investir pour diverses raisons. Oui, qui a envie de lire une saloperie de note qui traîne comme par hasard sur le chemin lorsqu'on est poursuivi par une créature immonde sortie tout droit du trou du cul de Satan ? Le doublage permet de susciter aussitôt l'intérêt auprès du joueur. On dit que des images valent mieux qu'un grand discours, eh bien je dis que s'il est raconté avec talent, c'est encore plus mieux, d'abord !


C'est en ce sens que Amnesia sait se démarquer d'entrée de jeu. Son schéma narratif ainsi que son rythme en font déjà un bon récit, et un exercice de style de qualité pour tout vidéaste débutant ou vétéran. Le seul demi-bé-demi-molle qu'on peut éventuellement lui reprocher serait sa tendance à cacher certaines notes et de posséder une histoire si complexe et un gameplay si dirigiste que louper une page peut vite rendre la suite confuse, quoique pas totalement incompréhensible pour autant. On arrivera tant bien que mal à recoller les morceaux manquants avec un peu de réflexion.

Quant à l'absence de certains doublages pour certains textes retrouvés, la raison s'explique facilement. Seules les pages du Journal de Daniel ont ce traitement de faveur. Il est donc logique que ce dernier les lise et entende sa propre voix. On le fait tout le temps. Comme là, toi. Tu lis ça mais tu entends ta voix dans ta tête. Pas la mienne. Sinon ce serait bizarre. Et là tu commences à entendre ma douce voix à la place. Et ça te fait sale flipper. Ton cerveau est à présent violé comme une biscotte perce sans vergogne le blanc d'un oeuf à la coque fraîchement craquelé. Oh oui...

Very Bad Descent

On dit souvent que les graphismes ne sont pas importants comparé à l'ambiance. Enfin ça c'est moi qui le dit. Il faut le prendre avec des pincettes, Georgette. Tout est question de contexte, vois-tu ? Il est indispensable de miser sur l'ambiance pour du petit budget, et quand on a une grosse production, la négliger au détriment de l'apparence est synonyme de balle dans le pied. Compte tenu de sa date de sortie, de ses moyens et de son style de jeu, on peut dire sans rougir qu'Amnesia disposait d'excellents graphismes en son temps. Et contrairement au cul ridé de notre hôte, il n'a pas mal vieilli du tout. Comme un grand cru, il se bonnifie même avec le temps. Les effets sont réussis, et les textures transmettent efficacement la sensation d'humidité obscure du grand trou d'Alexander... (son château, hein)

En terme de level design, si on reste sur du château dans la forêt somme toute classique, l'ambiance de l'époque est fidélement retranscrite et crédible. Ce naufrage dans les profondeurs de la demeure, au même titre que dans les méandres de l'esprit confus de notre héros, nous amène dans des endroits glauques dont on aura aucun mal à se souvenir, tels que la prison, les niveaux submergés ou encore les salles de torture.

 

Mais parlons de moches, parce que nous, on aime les moches ! Sur ce point, le bestiaire est à mourir, littéralement. Dans l'horreur, il y a fréquemment une tendance à la surenchère, des grosses erreurs de dosage, même. Un grand spécialiste en la matière mais dans un tout autre domaine se révèle être Guillermo Del Toro. Aussi brillant soit ce réalisateur, il y a dans ses films d'horreur une escalade exaltante dans la peur, la suggestion, une montée de moutarde crescendo pour tes glandes responsables de cette sensation désagréable qui dit que tu vas te chier dessus devant ton écran... pour se finir en une déception navrante. Et tel un soufflet percé violemment et sans ménagement par le chibre de Jason Biggs, la tension retombe nette une fois que le monstre est à nu... Rendant ainsi tout le build-up plein de suspense nul et non avenu. Pire encore : parfois la puissance octroyée au joueur rend la menace beaucoup trop fébrile et atténue le potentiel immersif du jeu.

Ici, c'est au contraire l'apothéose. Le Rocky de la terreur qui te met en PLS à côté de papy à l'hospice. Avec beaucoup de subtilité et une tension croissante, chaque créature dispose d'une introduction marquante sublimée par un environnement ainsi que des mécaniques légèrement différentes, qui en font de terribles menaces face à la faiblesse abhérrante, quoique froidement réaliste, de notre personnage. Qu'il s'agisse de Mr.Bouche qui laisse ses jolies petites fesses se faire désirer pendant un long teasing jusqu'à être brusquement dévoilé en pleine séance de masturbation intime dans une obscure cave à vins qui le laissa bouche-bée ; le Monstre Aqueux qui vous convaincra que prendre des bains, c'est le mal ; et enfin Vagina Ice qui n'est au final qu'un coup d'un soir entre deux Vierges de Fer... vous aurez les mains pleines, au même titre que votre arrière-train. Si l'Intelligence Artificielle des bébés d'Alexanderp ne sont pas prêts de gagner aux échecs contre Tesla, ils possèdent néanmoins l'agressivité nécessaire et la gueule de l'emploi pour vous rappeler que peu importe votre degré d'Alzheimer, la fuite, ça ne s'oublie pas.

 

La Mémoire dans le Pot

Et courir, Daniel en aura bien besoin. Si l'on ne voit jamais le bougre (allez savoir par quel miracle cet Alexander possède un château de la taille de cinq terrains de foot et pas un seul miroir à l'intérieur - faut vraiment mal vivre sa vieillesse) en dehors de sa douce et soyeuse main porteuse de la sacro sainte torche à huile, cela n'empêche pas pour un sou l'immersion totale du joueur plongé pour le coup dans une paranoia constante sublimée par un gameplay innovant. On peut même dire au contraire que la vue à la première personne renforce ici cette sensation claustrophobique de perdition voulue par les développeurs. À l'instar d'un point and click des temps modernes, notre cher amnésique au cul verni aura la chance de pouvoir tripoter n'importe quoi, et de soulever poutres, cailloux, objets relativement lourds, et ce sans jamais s'armer. Quel pacifiste ! Mais ce n'est en rien un mal, car Amnesia ne mise pas sur la défense, et encore moins l'attaque. Tel un Daniel Fisher de l'antiquité, il faudra ici se faire tout petit afin de ne pas se faire repérer par les sbires nudistes d'une grande tenacité - et loin de s'en tenir à la simple bise sur la joue en guise de salutation. En Prussie, c'est main au cul et viens que j't'empale sur le premier sapin venu.

 

Bon, j'extrapole, mais Amnesia: The Dark Descent a définitivement la qualité d'un jeu d'infiltration en intégrant des outils de survie ET de ressources afin de conserver non pas une barre de vie tradtionnelle, mais une barre de santé mentale ! Innovant et épurant bien l'écran pour favoriser la mise en abîme et l'oubli de notre sécurité IRL afin de mieux s'engouffrer dans la douce folie moins amère que le laudanum - qui est en fait un puissant laxatif, mais soit. Ceci constitue une des nombreuses qualités de ce bijou d'horreur qui sait instaurer une ambiance efficace et un univers cohérent en à peine quelques heures de jeu. Instaurer une jauge de sanité est une excellente idée, sans doute tirée des jeux de rôles populaires s'inspirant également de l'univers Lovecraft dont les thèmes centraux tournent fréquemment autour de la démence, mais on peut regretter éventuellement une certaine frilosité à l'égard de ce système. S'il permet en effet quelques jolies hallucinations de temps à autre, ou des paralysies pour corser vos séances de cache-cache haletantes, sa gestion demeure à mon goût assez simple et manque d'un aspect punitif croissant selon l'avancée dans le jeu. Mais ce fonctionnement basique n'en demeure pas moins efficace au possible et tout le reste n'est que propositions d'amélirations de ma part. Pousser ce concept au bout de son idée serait réellement intéressant !

Le plus important est que la peur ne laisse jamais place à la frustration car, avec sa difficulté bien équilibrée, c'est systématiquement au joueur de rester à l'affut de ses ressources, de sa discrétion, de gérer sa curiosité et donc sa santé psychologique ; et tant qu'à faire ses quelques flatulences lâchées entre deux caisses amovibles. Ce qui s'avère parfois délicat mais tout le temps possible avec un brun de courage et de concentration. Concernant les quelques énigmes parsemées dans le sombre domaine, elles sont efficaces, suffisamment variées et faisant toujours appel au système de déplacements des objets afin d'être résolues. Autrement dit, elles sont là, pas trop dérangeantes, on pourrait s'en passer, mais elles fonctionnent alors pourquoi pas.


Doté d'un gameplay intelligent et très libre qui permet entre autre à des imbéciles comme moi d'accoucher de personnages légendaires tels que Potty le Pot de chambre (une urne funéraire, CQFD), Jeffrey le seau Britannique et Caillou le Caillou, Amnesia offre malgré un script on ne peut plus dirigiste une certaine marge de mouvement bienvenue et magnifiant l'angoisse de chaque tournant. Diversions, barrages, obstacles, compagnons, ce système très intuitif saura séduire autant que faire grincer des dents, notamment quand sera venu le temps de refermer précipitamment à l'aide de ses deux petites fesses la porte derrière-soi, poursuivi par un George visiblement bien chaud.

 

 

Souviens-toi l'Été Daniel 

De ce fait, on se retrouve avec tous ces excellents éléments qui sauront tenir leur promesse jusqu'aux crédits. Malgré une fin aux choix multiples un tantinet anti-climatique peu gratifiante mais raisonnable (ne nécessitant pas néanmoins de recommencer X fois le jeu pour la quête d'un objet secondaire inutile comme le papier toilette favori d'Alexander), le jeu va au bout de son idée balancière de liberté conditionnelle. S'il est surprenant que le seul choix moral auquel est confronté Daniel se situe à la fin de son périple inoubliable, il est certain que la construction narrative justifie néanmoins cette approche puisque ce dernier ne fait que découvrir ce qui A ÉTÉ FAIT, et qu'il a préféré oublier.

 

En plus de son contenu original, le studio a eu l'originale idée de proposer un Custom Mode permettant aux plus créatifs d'inventer leurs propres maps & scénarios, autorisant ainsi une continuité et une longévité certaine à son titre. Si aujourd'hui la chose est plutôt courante, c'était en ce temps réellement opportun et ambitieux que de proposer un bac à sable ouvert à tous dans le genre du Survival Horror. Il est dit par ailleurs que grâce à cela, des Custom Stories ont vu le jour et certaines égaleraient même en qualité narrative et en idée le titre originel. Plutôt pas mal, non ? Qui plus est, le jeu s'offrit le luxe d'un DLC (Amnesia: Justine) par la suite, incarnant une femme avec le même principe que l'opus principal mais doté d'un nouveau décor, nouvelle histoire, nouveau monstre. Rien de transcendant étant donné la courte durée de ce bonus, au fond néanmoins appréciable. 


Un menu efficace, une interface épurée, une ambiance sonore effroyablement stressante signée Mikko Tarmia - qui arrive par son art à sublimer la sale gueule de George pour le rendre encore plus terrifiant qu'il ne l'est déjà, c'est dire ; tout est réussi. Quasiment un sans-faute donc pour ce titre, qui marqua véritablement le genre et chaque YouTuber, initiant ces derniers à un exercice extrêmement complet. S'il manque un petit facteur "Waouh" à cette expérience dans sa globalité, Amnesia: The Dark Descent est sans l'ombre d'un doute un grand Survival Horror. Il est celui qui a redonné ses lettres de noblesse à un genre qui tendait de plus en plus vers l'action au détriment de l'angoisse issue de l'impuissance et de la terreur guidée par l'imaginaire. C'est avec ces éléments en tête que le quatrième jeu de Frictional Games marqua les mémoires et grava le nom du studio comme celui du développeur du siècle à surveiller de près pour tous les amateurs de frissons qui font dresser les poils de fesses. Et c'est avec cette impatience de la première heure que l'on attend leur prochain projet intitulé SOMA, date de sortie annoncée pour fin 2015, promettant de reprendre les bases de leurs précédents succès dans un univers nouveau mais dévolu à nous faire également sombrer dans un effroi glacial que l'on est pas prêt d'oublier...

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Pour chaque Let's Player qui se respecte, il y a un baptême du feu. Une première fois. Pour certains, ce fut l'élément déclencheur d'une longue route arpentée de succès, pour d'autres ce ne fut qu'une étape à passer. Pour moi, cela se traduisit par un violent dépucelage en découvrant ce qui se fait de meilleur dans le Survival Horror contemporain. Quoiqu'il en soit, Amnesia: The Dark Descent a marqué le paysage du jeu vidéo d'horreur des joueurs PC. S'imposant là où le genre n'était que bien souvent timides portages ou essais infructueux, ce chef-d'oeuvre, bien paradoxalement à son titre, ne sera pas oublié. En effet, c'est avec une maestria indéniable que Frictional Games frappa un grand coup aux immenses portes de chênes qu'arborent nos forteresses intérieures recelant nos pires angoisses... 

AMNESIA: THE DARK DESCENT

Sorti le 8 septembre 2010

Dévelopeur : Frictional Games

Genre : Survival Horror

Support : 

Treuf'Analiz

TREUFAVORABLE

TREUFINDIGNE

  • Très bons graphismes, moteur qui n'a pas mal vieilli.

  • Gameplay innovant offrant une certaine dose de liberté.

  • Bestiaire effrayant avec un monstre principal inoubliable !

  • Ambiance musicale très réussie et anxiogène.

  • Certains niveaux bien glauques. 

  • Une histoire mystique travaillée qui tient en haleine.

  • L'inspiration Lovecraft, toujours un plaisir !

  • Immersion rapide et garantie.

  • Gros effort sur les doublages très convaincants !

  • Difficulté bien dosée, "énigmes" intéressantes.

  • Rejouabilité correcte avec un DLC et un mode CUSTOM.

  • C'est quand même grâce à ça que sont nés Jeffrey,  Caillou, Potty et Os !

  • Prise en main parfois difficile. (portes, trapes...)

  • Un ou deux monstres en plus aurait été fantastique !

  • Histoire compliquée à suivre si on manque une note un peu trop bien cachée. 

  • Les fins qui manquent de panache.

  • Système de gestion de ressources excellent mais un peu timide dans ses engagements.

8/10

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Photos par : Treufy 

© 2015 par Treufy, en collaboration avec Lordyce. Tous droits réservés.
 

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